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avril 2017

12.04.2017

Et si, pour la Cour de cassation, les opposants à la loi « Travail » n’avaient, en fait, lutté que contre des moulins…

Qui ne se souvient de ces manifestations parfois massives, souvent violentes, de la fronde parlementaire et de l’utilisation de l’article 49-3, qui ont ponctué l’actualité de l’année 2016 ?

Et si tout ceci n’avait été que du vent faisant tourner les ailes de moulins que de farouches combattants étaient bien déterminés à pourfendre au nom de la défense des acquis sociaux ?

Au cœur du dispositif incriminé, la primauté de la négociation collective en entreprise, battant en brèche les accords âprement négociés par des syndicats aussi représentatifs que pragmatiques.

Henri Krasucki dont les plus anciens se souviennent plus comme secrétaire général de la CGT inféodé à la dive bouteille et au KGB, que comme le grand spécialiste de Shakespeare qu’il était pourtant, n’aurait pas manqué de s’exclamer « Much ado about nothing ! »

La chambre sociale de la Cour de cassation, par ailleurs peu suspecte d’être à la solde du grand capital, lui aurait sans doute donné raison.

C’est tout au moins la conclusion que l’on peut tirer d’une décision rendue le 1er mars dernier (n°16-10047) au sujet de la fixation du contingent annuel d’heures supplémentaires.

Cassant un arrêt de la cour d’appel de Versailles, la Cour de cassation rappelle que la primauté de l’accord collectif d’entreprise ou de branche sur une convention ou un accord de branche date de 2008. C’est en effet l’article 18 de la loi n°2008-789 qui a institué le principe de subsidiarité de la convention ou de l’accord de branche pour la fixation du contingent annuel d’heures supplémentaires. Qui plus est, comme l’avait souligné le Conseil constitutionnel lorsque la loi avait été soumise à sa censure (décision n°2008-568 DC), cette disposition impérative est d’application immédiate.

Dès lors peu importe que les conventions antérieures n’aient pas été dénoncées, qu’elles ne prévoient pas de possibilité de déroger à leurs stipulations, ou que le plafond d’heures supplémentaires soit inférieur à celui que prévoit l’accord d’entreprise. Toutes ces objections sont sans valeur au regard de l’inversion de la hiérarchie des normes qu’institue cette loi. Ce n’est qu’à défaut d’accord d’entreprise, qu’il soit plus ou moins favorable, que s’appliquent les accords de branche.

La loi du 8 août 2016 (n°2016-1088) tant combattue, n’a fait que généraliser ce principe maintenant ancien.

Le ver était donc dans le fruit ! « There is something rotten in the state of France ! » aurait pu s’exclamer l’apparatchik anglophile !